LA TRANSACTION
Nous sommes au mois de mars. Polaris arrive sur YatchWorld. Un Lagoon 400 S2 comme on le cherchait, comme on en rêvait, comme on l'imaginait. La fin de notre séjour en Tunisie était annoncé pour l'été. Le compte à rebours était lancé. Notre projet en famille à voile devait avoir lieu. Il nous manquait seulement la bête tranquille.
En 2-3 coups de fil passés via Skype, l'offre d'achat se dessine. Notre futur catamaran sera d'origine grecque. Non seulement de cette nation mythique de navigateurs mais d'autant plus, Polaris avait passé ses premières années à naviguer à partir de son port d'attache, la célèbre ile de Santorini.
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| Moi et Yanis |
Yannis, le broker grec me met rapidement en confiance; il me donne 3 références de québécois qui ont déjà acheté leur voilier en Grèce via ses services. Je les contacte tous. Tous très satisfaits de ses services malgré les dédales administratives grecques. Je vous le recommande vivement si votre plan est de regarder du coté de la Grèce pour votre futur achat.
Du coté québécois, c'est mon conseiller maritime qui m'accompagne depuis plusieurs mois, après 2 tentatives ratées, qui s'accroche à l'idée que cette fois-ci soit la bonne. M. Raymond Hébert est une sommité au Québec pour tout ce qui est transactions de bateaux de plaisance à l'étranger. Vraiment, je confirme. Ancien de la Banque Nationale, il aide à naviguer dans ces transactions tumultueuses aux ramifications légales complexes. Celles-ci peuvent se révéler de vrai casse-têtes pour celui qui n'y s'est jamais aventuré. Je vous recommande M. Hébert également, vivement. La formule gagnante: toujours être bien entouré.
Alors, ça y est, quelques semaines plus tard, les formalités s'achèvent, le chantier supervisé avec l'aide de Yanis abouti. Le deadline est fixé. J'ai une semaine de vacances. Le skipper recommandé qui m'aidera s'appelle Yiorgos. J'apprends que c'est lui à la dernière minute car le skipper français qui devait m'accompagner se fait appeler sur un autre call. Cependant, Yiorgos connait la Med comme le fond de ses poches, surtout la Grèce, là où il navigue comme skipper pro depuis plus de 20 ans. Il est également instructeur certifié. Un chic type avec qui j'ai beaucoup appris sur cette traversée. Par contre, la veille de partir, la boule dans l'estomac se forme. L'adrénaline se déclenche.
Aller simple Tunis-Athènes via Rome. Retour par la mer. Une première pour moi de prendre le large ainsi, au-dela de 150 miles nautiques des cotes. J'amène avec moi le livre homonyme de Paulo Coelho, que je dévorerai en une seule journée, au jour 3. Sinon, on s'en tient à l'essentiel.
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| La Marina Alimos |
J'arrive et l'oeuvre m'ébloui. Elle est là , prête, en cale sèche. Les anciens proprios l'ont cajolé malgré sa vocation commerciale. Ils ont déjà réalisé le carénage, l'ont bien lustré. Entretien des moteurs et des saildrive déjà complété. Il ne restait qu'à finaliser l'installation des options supplémentaires que je lui faisais ajouter: 4 nouveaux panneaux solaires nouvelle génération de 270w chaque, montés sur une structure d'inox, remplacement du parc de batteries avec upgrade à 800 ah AGM, nouvel inverter Victron de 3000w, livraison d'une nouvelle annexe RIB310 avec moteur Honda 15 HP, ajout d'un bout-dehors + winch et poulies pour gréement de Gennaker et Spi, ajout d'un radar Raymarine, d'un AIS, achat de pièces de rechange chez Yanmar et Nautilus, etc...
J'ai donc sous-estimé de quelques jours ces livraisons et travaux à finaliser. Yiorgos est en support, bon coup de pouce.
Heureusement que la marina est vraiment bien située avec des petits restos grecs sur la rive, servant des mets absolument délicieux et authentiques.
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| Ici, c'est l'essence qui vient vers toi. Pas besoin de te déplacer à la pompe ! |
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| Même l'épicerie est en mode livraison à domicile !! |
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| On part demain à l'aube, yé ! |
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| Fin prêt ! |
La finition de la structure d'inox est pas mal avec les fixations sur la casquette mais la veille du départ, j'ai quand même fait appel à un pro qui a ajouté 2 barres diagonales pour solidifier la structure qui risque de se faire souffler. Le résultat final est super !
JOUR 1, 23 mai
Belle journée ensoleillée. L'itinéraire que nous retenons nous amènera vers le canal de Corinth, au nord des Péloponnèses. Un vent soutenu nous accueille, à contre-sens à travers la première circulation de cargos qui attendent leur tour en rade pour s'amarrer au port de Pirée, un des plus grands d'Europe.
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| À l'accueil du canal |
À la question des autorités portuaires: qui est le skipper ? Je regarde Yiorgos, et il leur dit : François ! Bien sur, mais dans les faits, Yiorgos sait me mettre en confiance et me guide à travers ce canal en plus d'avoir ben du fun.
Vraiment étrange de repasser sur ce lieu mythique car il y a plus de 21 ans, je passais la-haut, en backpack avec mon ami d'enfance Vincent pour aller faire le tour des Péloponnèses en scooter. Autre point de vue spectaculaire.
La première nuit de navigation se passe bien. Ayant le vent de face, nous actionnons les moteurs qui ronronnent doucement à 2000 tours pour un 4,5 knts de vitesse moyenne.
Au bout du Golfe, le pont Rion-Antirion me coupe le souffle. Un étrange lien de ressemblance avec le nouveau pont Samuel de Champlain à Montreal.
JOUR 2, 24 mai
Nous continuons notre course vers l'ouest. Petit arrêt à Mesolongio.
JOUR 3, 25 mai
Première traversée sans voir de terre pendant plus de 36 hres entre la Grèce et l'Italie, voile pour la plupart du temps.
JOUR 4, 26 mai
Les paysages italiens et siciliens révèlent leurs splendeurs et leur histoire. Nous nous dirigeons vers le détroit de Messina.
Ce détroit de Messina est un lieu mythique qui est décrit dans le récit d'Homer. Charybde et Scylla, qui chacun de leur coté du détroit, ont sculpté les croyances de marins avident d'explications jusqu'à aujourd'hui. Le canal, réputé étroit, est sujet à des courants importants.
Il ne faut pas craindre ces légendes millénaires à en croire ce kitesurfer qui était seul et qui est venu nous saluer en plein milieu du canal. La scène était assez surréaliste.
JOUR 5, 27 mai
Passé le détroit, le vent se lève mais vient de la terre, de la Sicile. La houle étant faible, nous avons pu bien testé les voiles, le bateau, son assiette, sa vitesse, la prise de ris, le comportement. Remarquable. On s'alterne sur nos quarts sans souci. Aucun signe de mal de mer.On voit passer Palerme sur notre flanc babord.
JOUR 6, 28 mai
Nous décidons de passer la nuit à San Vito Lo Capio pour attendre que la houle se calme et que notre fenêtre entre la Sicile et la Tunisie soit propice. Ce jour 7 sera le plus long sans voir la cote. Une traversée qui nous amènera sur le continent africain le lendemain.
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| San Vito Lo Capo |
Ça y est, le 28 mai à 6h du matin, nous arrivons sur Gammarth, à Tunis après une autre nav de nuit qui m'a permis de bien testé mes systèmes, mon nouvel AIS, radar car pour arriver sur la baie de Tunis, il faut traverser le rail, ce boulevard à 2 sens uniques où se succède des dizaines de cargos et pétroliers en provenance de Gibraltar vers le Moyen-orient ou en arrivée de la Mer Noire.
Petit oubli, le drapeau jaune pour signaler l'entrée en eaux territoriales. On s'est quand même débrouillée avec ce que nous avons trouvé.
Notre pendille nous attendait à la marina de Gammarth. Une marina qui se situait à quelques minutes de notre maison en location à Tunis.
Les formalités se déroulent très bien. Du personnel de la marina est venu nous accueillir en annexe malgré l'heure (6AM). Les douaniers et la garde nationale sont accueillants, pas de pépins. Mention spéciale à Anis Zarrouk, capitaine du port de Gammarth, toujours à l'écoute et prêt à rendre service.
Nul besoin de dire que le papa était content de revoir ses futurs matelots !! Et maman, grand sourire. On en a profité pour relaxer un peu et se transformer en guide pour Yiorgos à Sidi Bou Said, le temps d'un après-midi. Il devait retourner skipper en Grèce pour la saison, il ne reverrait pas sa famille, dont sa fille avant octobre. Quoique plaisante, la vocation peut être exigeante à cet égard.
Bref, une super expérience qui met la table pour les prochaines semaines.
